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Ecrire après l'enfer
13 mai 2010

Quand les mots ne suffisent plus.

 Comment se peut-il que la langue de Goethe soit aussi celle de la barbarie nazie ?

 A la fin de la seconde guerre mondiale, de nombreux écrivains allemands, abasourdis par l’horreur des charniers d’Auschwitz ou de Buchenwald cherchent dans l’écriture l’expiation de ce pêché impardonnable. Comment décrire, par la même langue qui servit à exterminer certains Juifs, la honte, le regret et la souffrance laissés par ce passage unique et tragique de l’histoire européenne ? Il n’y a pas de réponse certaine mais des tentatives et des expériences. Aucune langue ne peut parvenir à décrire l’indicible.

 De même qu’il y eut plusieurs courants littéraires jalonnant la littérature allemande, il y eut un « avant Auschwitz » et un « après Auschwitz ». Certains auteurs, comme Heinrich Böll, ont cherché le salut dans une écriture aussi sobre que dépouillée. D’autres, comme Paul Celan (d’origine juive) cherchèrent à démonter, fabriquer, restructurer les mots pour arriver à une nouvelle langue, loin de celle qui commit le génocide. Pour cet écrivain complexe, sa langue maternelle était également celle des bourreaux : « Muttersprache ist Mördersprache ».

 Nos élèves n’ont pas le vécu de ces écrivains, mais leurs émotions se sont manifestées à travers leur regard parfois baigné de larmes. Ils ne peuvent certes prétendre détenir les clés qui pourraient permettre à un peuple tout entier de faire son deuil mais ils ont rendu un hommage vibrant à ces personnes mortes dans des circonstances affreuses par la portée de leur silence.

 Ce voyage à Auschwitz restera marqué en leur mémoire, gravé sur la pierre de leurs souvenirs lycéens. Ils reverront les objets, sentiront le froid glacial, entendront les témoignages, imagineront ces cendres qui attestent qu’un jour, des hommes, des femmes et des enfants périrent ici, au nom de la folie humaine.

 Dans ce lieu de culte si particulier, réunis autour du Kaddish, au milieu d’élèves issus de l’immigration, nous ne vîmes en cette journée ni musulmans, ni juifs, ni catholiques, mais une seule humanité priant pour le salut de ceux que nous ne devons pas oublier.

Paul MAUDHUIT, professeur d'allemand

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Ecrire après l'enfer
  • Une partie de la classe de TBPL, la classe de TBPT, onze élèves méritants choisis parmi la classe de 1BPL et de TLOG2 se sont rendus au Mémorial de la Shoah à Paris dans le cadre de leur voyage à Auschwitz.
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